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On alla voir : derrière le talus qui borde un côté de la piste, la plaine était noire de tortues qui se livraient à leurs amours d’automne en entrechoquant leur carapace. Les mâles employaient la leur comme un bélier pour bousculer leur compagne et la pousser vers une pierre ou une touffe d’herbe sèche à laquelle ils l’acculaient. Ils étaient un peu plus petits que les femelles. Au moment de l’accouplement, ils se dressaient complètement pour les atteindre, tendaient le cou, ouvraient une gueule rouge vif et poussaient un cri strident. Quand nous sommes partis, de toutes les directions de la plaine on voyait des tortues se hâter lentement vers ce rendez-vous. Le jour tombait. On ne s’entendait plus.

— L'Usage du monde, p. 149, Collection Quarto, Éditions Gallimard, 2004